Quel est le statut juridique de la Lune ?


Droit spatial / jeudi, janvier 31st, 2019

La Lune a toujours fait rêver l’humanité et durant la course à l’espace de 1957 à 1975 l’atterrissage sur celle-ci fut très rapidement désigné comme l’ultime objectif à atteindre. En 1969 Neil Armstrong fut le premier à y marcher et cet exploit devint le moment plus important de l’histoire de l’exploration spatiale.

Mais pour que cette course à l’espace et l’envoi d’astronautes sur la Lune se déroule pacifiquement comme cela a pu être le cas, il a fallu mettre en place un certains nombres de règles juridiques.

Lune

Ce fut le cas avec le traité sur l’espace ou le traité sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes signé le 27 janvier 1967 et qui a posé les principes de l’exploration spatiale et notamment de la Lune. Ce traité fut complété par l’Accord régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes de 1979.

Le Traité sur la Lune de 1967 fut donc conclu dans un contexte de course à l’espace pour les besoins de l’exploration spatiale, mais surtout pour éviter la militarisation de notre satellite. Les deux grandes puissances de l’époque ont donc mit de côté leurs différends et ont conclu ce traité pour s’accorder sur les conditions de l’exploration de la Lune et donc le régime juridique applicable à celui-ci.

Mais alors que le Traité sur l’espace semblait suffisant pour donner à la Lune un régime juridique suffisant au vu des avancée de l’exploration lunaire, l’Union soviétique transmit dans les années 1971 un texte à l’ONU pour la renégociation d’un accord sur la Lune. Finalement, l’Assemblée Générale des Nations Unis donna son accord pour la conclusion d’un nouveau traité sur la Lune venant compléter celui de 1967 et les principes internationales, déjà existants.

Cette initiative politique de l’Union Soviétique d’un nouveau Traité n’était pas complètement anodine. En effet, après le succès de la mission Apollo 11 en 1969 permettant à un Homme de mettre les pieds sur la Lune, on pouvait penser que l’exploration de notre satellite allait s’accélérer de plus en plus allant jusqu’à une véritable colonisation. Ce ne fut malheureusement pas le cas, mais c’est dans cette perspective qu’apparue la nécessité d’un nouveau traité. Se posaient alors les questions du régime juridique applicable aux matériaux provenant de la Lune et du régime juridique globale de la Lune.

Nul doutes que les perspectives économiques, scientifiques, militaires étaient présent dans l’esprit des négociants de ce traité. Par ailleurs les principaux points de désaccord étant les règles d’utilisation des ressources naturelles de la Lune.

Finalement, un nouvel Accord sur la Lune et les autres corps célestes fut signé en 1979 inspiré fortement du Traité de 1967 et des autres principes internationales.

Champ d’application de l’Accord de 1979 :

C’est dans ses premiers articles que l’Accord pose son champ d’application. Ainsi, ce dernier est relatif à la Lune, aux autres corps célestes à l’intérieur du système solaire sauf la Terre à moins que des normes juridiques spécifiques soient adoptés pour ces corps célestes.

Les matières extra-terrestres atteignant la surface de la Terre par des moyens naturels ne sont pas concernées par ce projet, il est question ici de météorites.

Principe de liberté d’exploration et d’utilisation :

Le principe de liberté d’exploration et d’utilisation de la Lune tient du Traité sur l’espace de 1967 et a permis de mettre en place le libre et égal accès de tous les Etats aux activités spatiales mais aussi la liberté de la recherche scientifique.

Les Etats peuvent ainsi exercer leurs activités sur la lune, en sa surface et sous sa surface, y placer leurs objets spatiaux et les lancer en toute légalité.

La liberté de la recherche scientifique, quant à elle, comporte la faculté de collecter des échantillons scientifiques à des quantités appropriées.

De cette liberté il en ressort la non-appropriation de la lune et des autres corps célestes qui interdit toute revendication de souveraineté de la Lune par une nation, mais aussi toute création de titre de propriété privée.

Mais comme en droit, il n’existe pas de principe sans exception, cette liberté est atténuée par des limites posées dans les traités.

Les conditions à l’exercice de la liberté :

La première condition à l’exercice de la liberté précédemment énoncée est la conformité des activités spatiales au droit international y compris à la Charte des Nations Unis. Par cela, les parties au traité ont en quelque sorte voulu rappeler que même sur la Lune ou sur un autre corps céleste les principes généraux du droit international doivent être respectés.

Cette liberté doit être exercée dans la paix, le traité parle  » d’utilisation pacifique de l’espace « . Il s’agit de limiter la mise en orbite et l’usage d’armes nucléaires ou de destruction massive. A contrario la mise en orbite de satellites militaires ou espions n’est pas prohibé par les traités.

Article 4 du Traité sur l’espace de 1967 :

 » Les États parties au Traité s’engagent à ne mettre sur orbite autour de la Terre aucun objet porteur d’armes nucléaires ou de tout autre type d’armes de destruction massive, à ne pas installer de telles armes sur des corps célestes et à ne pas placer de telles armes, de toute autre manière, dans l’espace extra-atmosphérique « .

De plus cette liberté donnant lieu à une exploration de la Lune et des autres corps célestes doit se faire dans l’intérêt et pour le bien de tous les pays, par cela le traité renvoi à la coopération internationale.

Logiquement, ces limites au principe de liberté sont surtout d’ordre sécuritaire, au vu du contexte de la guerre froide de l’époque.

La protection de l’environnement est déjà l’honneur dans le traité de 1979. En effet l’article 7 en parlant de la Lune dispose que  » les Etats partis prennent des mesures pour éviter de perturber l’équilibre existant du milieu en lui faisant subir des transformations nocives, en le contaminant dangereusement par l’apport de matière étrangère ou d’une autre façon. » « Les Etats partis prennent aussi des mesures pour éviter toute dégradation du milieu terrestre par l’apport de matière extra-terrestre ou d’une autre façon « .

Toujours dans cette idée, il est prévu que les Etats doivent notifier le Secrétaire Général des Nations Unis de leurs plans concernant le placement de substances radioactives sur la Lune et l’objet de cette opération, il s’agit donc là d’en informer en amont.

Principe d’assistance :

Pour le bon déroulé des opérations spatiales et surtout au vu des risques encourus le traité a organisé un devoir d’assistance selon lequel tous les Etats devront prêter toute assistance possible aux astronautes même de nationalité différente en cas d’accident, de détresse ou d’atterrissage forcé sur le territoire d’un autre pays.

Enfin, le traité a aussi mis en place une règle de responsabilité selon lequel chaque Etat est responsable des dommages causés par ses lanceurs et de ses activités même non-gouvernementales.

Apollo

La Lune : patrimoine commun de l’humanité

Si le traité de 1967 n’en faisait pas allusion, l’Accord de 1979 a eu pour mérite de classer la Lune et ses ressources naturelles comme patrimoine commun de l’humanité en son article 11 et ce à la différence de l’espace.

Cet article 11 dispose en effet que :

 » La Lune et ses ressources naturelles constituent le patrimoine commun de l’humanité « .

Ce terme de patrimoine commun de l’humanité a donné lieu à de vifs échanges et des désaccords entre les Etats-Unis et l’URSS. En effet les Soviétiques soutenant que ce terme n’étant pas adapté il serait mal convenu de l’intégrer dans le traité. Les Etats du tiers-monde quant à eux soutenaient cette disposition qui fut finalement adoptée.

La notion de patrimoine commun de l’humanité peut alors renvoyer à deux inspirations :

  • d’abord l’affectation des ressources naturelles de la Lune à l’intérêt général et plus précisément à la recherche scientifique.
  • mais aussi la protection des Etats moins développés scientifiquement et économiquement

Le paragraphe 5 de l’article 11 dispose :

 » Les Etats parties au présent Accord s’engagent à établir un régime international, y compris des procédures appropriées, régissant l’exploitation des ressources naturelles de la Lune lorsque cette exploitation sera sur le point de devenir possible « .

Cette disposition pose l’idée ou le fondement d’un éventuel régime international permettant l’exploitation des ressources naturelles de la Lune et vise à donner à cette exploitation un côté plus équitable.

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