Space Traffic Management enjeux et réglementations pour la gestion du trafic spatial


Droit spatial / samedi, mars 18th, 2023

Le Space Traffic Management (STM) ou gestion du trafic spatial en français, est le processus de surveillance, de coordination et de conduite du trafic spatial dans l’espace extra-atmosphérique. Cela englobe tous les moyens et les règles permettant d’accéder à l’espace, d’y mener des activités et d’en revenir en toute sécurité et de manière durable.

Il est devenu un enjeu majeur au fil des années en raison de l’augmentation des activités spatiales, mais ne dispose pas d’une réglementation multilatérale efficace permettant le maintient d’un environnement spatial sûr et durable pour le futur. 

D’après l’UNOOSA (United Nations Office for Outer Space ou Bureau des affaires spatiales des Nations unies) en janvier 2022, il y avait près de 8 200 satellites orbitant autour de la Terre, dont près de 4 800 satellites actif. Et d’ici 2030 plus de 25 000 satellites devraient rejoindre l’orbite terrestre. Et ce nombre ne fait que progresser avec le développement de nouveaux projets spatiaux comme la création de méga-constellations de satellites. De plus, avec environ 30 000 débris en orbite et beaucoup d’autres non répertoriés, l’orbite terrestre semble de plus en plus surchargé.

Or, le maintien de la sécurité des activités spatiales et la création d’un environnement spatial sûr et durable est primordial. Ainsi, la mise en place d’un régime juridique international de gestion du trafic spatial semble de plus en plus nécessaire. Néanmoins, à l’heure actuelle, les textes nationales éparses ou internationaux non-contraignantes, ne permettent pas de garantir une sécurité optimale aux activités spatiales. La collision évitée de justesse en 2019 entre un satellite Starlink de SpaceX et un satellite de l’ESA illustre parfaitement cette situation. La société américaine, n’a pas réagi aux alertes de l’ESA et c’est le satellite européen qui a dû effectuer une manœuvre d’évitement.

La question du consensus autour du Space Traffic Management est particulièrement délicate car, pour les Etats, il s’agit d’une question de sécurité nationale. De plus avec la multiplication des Etats pouvant atteindre l’orbite terrestre un accord devient de plus en plus difficile à trouver. Enfin, s’ajoutent à l’équation les entités privées qui ont aussi leurs voix à faire valoir.

Le Space Traffic Management est défini par l’Académie internationale d’Astronautique comme « l’ensemble de dispositions techniques et réglementaires visant à promouvoir un accès sûr à l’espace extra-atmosphérique, des opérations dans l’espace extra-atmosphérique et un retour de l’espace extra-atmosphérique vers la Terre sans interférences physiques ou radioélectriques ».

Du côté réglementaire, l’accès à l’espace est garanti par le Traité sur l’Espace de 1967 qui prévoit une libre utilisation et un libre accès à l’espace extra-atmosphérique y compris la Lune et les autres corps célestes. Or, cette liberté sans frontières peut mettre en péril la liberté des autres acteurs des activités spatiales. Ainsi, l’application de ces principes fondamentaux dans le contexte du STM soulève des questions complexes. Par exemple, quelles sont les obligations des États pour prévenir les collisions et les débris spatiaux ? Comment réglementer les activités spatiales commerciales pour assurer la sécurité des objets en orbite ? Plusieurs réglementations nationales combinées avec des initiatives internationales tentent de répondre à ces questions.

Initiatives européenne :

Dans le domaine, l’Union européenne et la France ont été précurseur en proposant un projet de Code de conduite des activités spatiales déjà en 2008. Puis en 2014 avec un projet de code international de conduite des activités spatiales qui n’a finalement pas reçu le succès escompté. En effet, les Etats-Unis ont rejeté ce texte, car selon eux, il limiterait trop leur activités, notamment militaires, dans l’espace.

Plus récemment, le projet SpaceWays financé par l’Union européenne a pour ambition de présenter une évaluation politique, juridique et économique du Space Traffic Management, qui débouchera sur des recommandations et des lignes directrices à destination de la Commission européenne.

Cadre national français :

En France c’est la loi relative aux opérations spatiales de 2008 qui prévoit que des instructions ou des mesures peuvent être imposées aux opérateurs spatiaux dans l’intérêt de la sécurité des biens ou de la protection de l’environnement. Elle impose des obligations de limitation des débris spatiaux et de prévention des risques de collision.

L’article 22 Prévention des risques de collision de l’arrêté du 31 mars 2011 relatif à la réglementation technique en application du décret n° 2009-643 du 9 juin 2009 relatif aux autorisations délivrées en application de la loi n° 2008-518 du 3 juin 2008 relative aux opérations spatiales dispose :

Les systèmes doivent être conçus, produits et mis en œuvre et leur mission définie de façon à limiter, pendant l’opération spatiale et les trois jours qui suivent la fin de la phase de retrait de service, les risques de collision accidentelle avec des objets habités dont les paramètres orbitaux sont connus avec précision et disponibles.

Du côté américain :

En 2020, les États-Unis ont adopté la Space Policy Directive-3 (SPD-3), qui établit une stratégie de gestion du trafic spatial pour les activités spatiales américaines. La SPD-3 vise à améliorer la surveillance de l’espace extra-atmosphérique, à établir des normes et des pratiques pour minimiser les risques de collision, et à promouvoir la coopération internationale pour assurer un environnement spatial sûr et durable.

Les mécanismes internationaux :

Le cadre international paraît être la meilleure solution pour la mise en place d’un régime juridique contraignant du Space Traffic Management. C’est pour cela que les Nations unies ont mis en place un certain nombre d’initiatives, notamment le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), qui est chargé de promouvoir la coopération internationale pour l’exploration et l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique. Le but est de mettre en place un mécanisme permettant de coordonner et de faciliter la coopération entre les États, afin de permettre la construction d’un consensus sur cette question afin d’améliorer la durabilité des activités spatiales.

Ajouté à cela, l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), qui est une agence spécialisée de l’ONU, mène également des travaux de recherche concrets au niveau international à ce sujet. 

Enfin, des mécanismes de droit souple existent et veillent à créer des règles visant à modifier ou à orienter les comportements sans pour autant être contraignants. Parmi ceux-ci, on peut mentionner les Lignes directrices du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique aux fins de la viabilité à long terme des activités spatiales de 2021, les Recommandations sur les législations nationales relatives à l’exploration et à l’utilisation pacifiques de l’espace extra-atmosphérique. De plus le groupe de travail du COPUOS du Bureau des affaires spatiales des Nations unies, présente chaque année un certain nombre de lignes directrices et de rapports concernant la viabilité à long terme des activités spatiales

Ces textes nationaux et lignes directrices ne semblent pas à la hauteur des enjeux et des défis du Space Traffic Management, l’augmentation des activités spatiales. La solution pour créer une réglementation efficace passera sans aucun doute par la coopération internationale et l’uniformisation des règles.

Sources :

 

 

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