Les États-Unis ont exprimé leurs vives réserves à l’égard du projet de règlement spatial de l’Union européenne, estimant qu’il imposerait des « contraintes réglementaires inacceptables » aux entreprises américaines du secteur. Dans des commentaires officiels transmis à la Commission européenne le 4 novembre, Washington alerte sur un texte jugé trop prescriptif et potentiellement discriminatoire pour les acteurs non européens du marché spatial.
Washington dénonce des mesures « ciblant » les entreprises américaines
Présenté en juin 2025, le projet d’EU Space Act vise à établir un marché intérieur commun pour les activités spatiales et à harmoniser la réglementation applicable aux opérateurs de satellites.
Dans sa réponse officielle aux consultations menées par la Commission Européenne, le gouvernement américain se dit « profondément préoccupé » par plusieurs aspects du projet, qu’il considère comme une source potentielle de barrières non tarifaires.
Le document souligne que certaines dispositions « semblent spécifiquement dirigées contre les entreprises américaines en raison de leur taille, de leur succès et de leur capacité d’innovation », citant notamment les opérateurs de constellations de satellites.
Les autorités américaines estiment que le texte, en l’état, pourrait entraver la coopération transatlantique et aller à l’encontre des engagements pris dans le cadre de l’accord commercial bilatéral signé à l’été 2025.
Washington appelle l’Union à adopter une approche « plus ouverte et compatible avec les standards internationaux », fondée sur la reconnaissance mutuelle des cadres réglementaires existants.
Des règles trop prématurées pour un domaine encore en développement
Le projet européen prévoit de nouvelles obligations pour les opérateurs, notamment l’obligation d’équiper chaque satellite de propulsion pour éviter les collisions ou encore de limiter la pollution lumineuse.
Les États-Unis jugent ces mesures trop restrictives et prématurées, estimant que les opérations spatiales sont encore un domaine en développement, qui nécessite flexibilité et innovation plutôt que réglementation détaillée.
Sur le plan environnemental, Washington met également en garde contre des obligations jugées coûteuses et difficilement applicables, telles que la réalisation d’analyses complètes du cycle de vie des missions spatiales.
Ces mesures risqueraient, selon les autorités américaines, de freiner l’accès à l’espace pour les petites entreprises et la recherche.
De manière générale, les États-Unis demandent les modifications suivantes au projet de EU Space Act afin de répondre aux préoccupations soulevées par la version actuelle :
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Normes internationales : aligner le texte sur les lignes directrices, normes et règles internationales et industrielles existantes pour les systèmes et opérations spatiaux, élaborées par consensus au niveau international ;
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Coopération : faciliter la coopération avec le gouvernement des États-Unis (USG) et l’industrie, plutôt que d’introduire de nouveaux obstacles à cette coopération ;
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Equivalence : préciser les modalités du processus d’équivalence et de reconnaissance mutuelle applicable aux acteurs gouvernementaux et industriels des États tiers ;
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Fournir davantage d’informations et de clarté directement dans le texte du EU Space Act lui-même (plutôt que dans des textes d’exécution séparés), afin que les parties prenantes y compris les États membres de l’UE soient pleinement conscientes des implications avant son adoption, plutôt que de confier ces fonctions à la Commission européenne ;
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Activités civiles gouvernementales : permettre la poursuite des activités civiles gouvernementales menées par les États membres de l’UE et par des partenaires tels que les États-Unis, en envisageant par exemple une exemption similaire à celle prévue pour les activités relevant de la sécurité nationale dans le projet d’acte ;
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Souligner que les États membres, et notamment les alliés de l’OTAN, doivent pouvoir continuer à s’appuyer sur les capacités spatiales commerciales de pointe américaines, afin de soutenir l’investissement dans les capacités destinées à renforcer la sécurité européenne et la coopération transatlantique dans le domaine de l’industrie de défense.
La réaction du président de la FCC
Le président de la Federal Communications Commission (FCC), Brendan Carr, a également réagi publiquement à la publication de ces commentaires en soulignant les inquiétudes américaines :
« Les États-Unis et l’Union européenne coopèrent depuis des années dans le domaine spatial, au bénéfice des deux continents. Cependant, comme l’indiquent ces commentaires, les États-Unis expriment leur profonde inquiétude quant aux mesures prises par l’Union européenne qui imposeraient des contraintes réglementaires inacceptables aux fournisseurs américains.«
— Brendan Carr (@BrendanCarrFCC), 4 novembre 2025
Une consultation publique qui se poursuit
La Commission européenne a ouvert la consultation publique sur le projet de loi afin de recueillir les contributions des États membres, des entreprises et des partenaires internationaux.
Les commentaires américaines illustrent la sensibilité du sujet au plan commercial et diplomatique, dans un contexte de montée en puissance des acteurs privés et de concurrence accrue dans l’espace.
Le texte définitif du EU Space Act devrait être présenté au Parlement européen en 2026. La Commission européenne a indiqué que les contributions reçues lors de la consultation publique, y compris celles des partenaires étrangers, seront examinées avant la présentation d’une version révisée du texte au Parlement et au Conseil.




